Un nouveau décret dit “anti cadeaux” relatif aux relations médecins-industrie a été publié le 15 juin 2020. L’entrée en vigueur de ses dispositions est prévue au 1er octobre 2020. Le décret n°2020-730 vient préciser les modalités relatives aux avantages offerts par les personnes fabriquant ou commercialisant des produits ou des prestations de santé. Il détermine les personnes physiques ou morales concernées, la nature et les conditions des dérogations à l’interdiction d’avantages, ainsi que les modalités du régime de déclaration et d’autorisation des dérogations.
Pour rappel, l’article L. 1453-3 du code de la santé publique dispose que :
« Est interdit le fait, pour les personnes mentionnées à l’article L. 1453-4, de recevoir des avantages en espèces ou en nature, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, proposés ou procurés par les personnes mentionnées à l’article L. 1453-5. »
Selon l’article L. 1453-5 du même code, modifié par la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 :
« Le fait d’offrir ou de promettre des avantages en espèces ou en nature, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, à des personnes mentionnées à l’article L. 1453-4 est interdit à toute personne assurant des prestations de santé, produisant ou commercialisant des produits faisant l’objet d’une prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale ou des produits mentionnés au II de l’article L. 5311-1, à l’exception de ceux mentionnés aux 14°, 15° et 17°. »
L’avantage est un don, un cadeau qui peut être accordé dans le cadre ou en dehors de toute convention. La circulaire n° DGS/PF2/2013/224 du 29 mai 2013 précisait que ne sont ainsi pas considérés comme des avantages les rémunérations, les salaires et les honoraires qui sont la contrepartie d’un travail ou d’une prestation de service.
Cette circulaire cite des exemples : les avantages en nature peuvent consister en des cadeaux, des dons de matériels, des invitations, des frais de restauration ou la prise en charge des voyages d’agrément et les avantages en espèces en des commissions, des remises, des ristournes ou des remboursements de frais.
Il n’y a pas avantage dès lors qu’il y a contrepartie proportionnelle. Une rémunération manifestement disproportionnée par rapport au travail ou à la prestation de service rendue est susceptible d’être requalifiée en avantage ou en cadeau prohibé.
Selon l’article L. 1453-6 du code de la santé publique, ne sont pas constitutifs d’avantages :
- la rémunération, l’indemnisation et le défraiement d’activité prévues par un contrat de travail ou un contrat d’exercice, dès lors que ce contrat a pour objet l’exercice direct et exclusif de l’une des professions prévues à l’article 1453-4 ;
- les produits de l’exploitation ou de la cession des droits de propriété intellectuelle relatifs à un produit de santé ;
- les avantages commerciaux offerts dans le cadre de contrats d’achat de produits ou de prestations conclues entre les acteurs visés d’une part par l’interdiction de recevoir, et l’interdiction d’offrir ou de promettre d’autre part (ex : remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers attribués dans le cadre de ces relations commerciales) ;
- les avantages en espèces ou en nature qui ont trait à l’exercice de la profession du bénéficiaire et d’une valeur négligeable ne pouvant excéder les montants prévus, par nature d’avantage, par arrêté des ministres chargés de l’économie et de la santé.
Le Décret 2020-730 définit maintenant précisément les « personnes assurant des prestations de santé » visées à l’article L. 1453-5 précité, indiquant qu’il s’agit des personnes physiques ou morales :
- qui exercent une activité relevant d’un régime d’autorisation, d’agrément, d’habilitation ou de déclaration prévu à la sixième partie, à savoir les établissements publics et privés de santé, les personnels médicaux et pharmaceutiques, les laboratoires de biologie médicale, les biologistes médicaux et les services de santé.
- qui exercent une activité relevant d’un régime d’autorisation ou d’agrément par l’agence régionale de santé et prévu au livre III du code l’action sociale et des familles, visant les établissements et services sociaux et médico-sociaux ;
- qui assurent une prestation de service prise en charge soit par les régimes obligatoires de sécurité sociale au titre de l’assurance maladie, de l’assurance invalidité ou de l’assurance maternité, soit par l’aide médicale d’Etat, soit par l’Etat en application des titres Ier et II du livre II du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre.
Les dérogations possibles aux interdictions précitées sont prévues à l’article L. 1453-7 du code de la santé publique et concernent :
- la rémunération, l’indemnisation de défraiements d’activité de recherche,
- les dons en espèces ou en nature destinées à financer exclusivement des activités de recherche, de valorisation de la recherche ou d’évaluation scientifique,
- les dons aux associations,
- l’hospitalité offerte de manière directe ou indirecte lors de manifestations à caractère exclusivement professionnel ou scientifique,
- le financement ou la participation au financement d’actions de formation professionnelle ou de développement professionnel continu.
L’offre d’un avantage relevant de l’article L. 1453-7 est conditionnée à la conclusion d’une convention. Il est prévu par le décret du 15 juin 2020 que la convention qui stipule l’offre d’avantages dont la valeur est inférieure aux montants fixés par arrêté doit être transmise avec les pièces jointes au plus tard huit jours avant le jour de l’octroi de l’avantage au Conseil national de l’Ordre concerné ou l’ARS selon les cas (article R. 1453-15 du code de la santé publique). Il s’agit d’un régime déclaratif.
Dans le cas d’un régime d’autorisation applicable lorsque le montant de l’avantage offert excède les seuils fixés par arrêté, l’autorité compétente statuera alors dans un délai de deux mois à compter de la date de réception du dossier (article R. 1453-18 du code de la santé publique). L’absence de réponse vaut autorisation tacite de la convention. En cas d’urgence, l’autorité compétente peut se prononcer dans un délai de trois semaines.
L’arrêté fixant les montants des seuils des avantages soumis à autorisation ou à déclaration a été publié le 7 août 2020 et entrera en vigueur également le 1er octobre 2020. Il est ainsi prévu que :
Les montants au-delà desquels la conclusion d’une convention prévue à l’article L. 1453-8 du code de la santé publique et stipulant l’octroi d’avantages relève d’une autorisation délivrée par l’autorité administrative ou l’ordre professionnel sont fixés comme suit, pour chacune des catégories de professions et pour chacune des dérogations prévue à l’article L. 1453-7 du même code. Ces seuils sont applicables pour l’ensemble de la période couverte par la convention.
Avantages bénéficiant aux membres des professions médicales, aux membres des professions d’auxiliaires médicaux et aux membres des autres professions prévues au 1° de l’article L. 1453-4 du code de la santé publique :
- rémunération nette, indemnisation et défraiement d’activités de recherche, de valorisation de la recherche, d’évaluation scientifique, de conseil, de prestation de services ou de promotion commerciale : 200 € par heure, dans la limite de 800 € par demi-journée et de 2 000 € pour l’ensemble de la convention ;
- dons et libéralités destinés à financer exclusivement des activités de recherche, de valorisation de la recherche ou d’évaluation scientifique : 5 000 € ;
- hospitalité offerte lors de manifestations à caractère exclusivement professionnel ou scientifique, ou lors de manifestations de promotion des produits ou prestations : 150 € par nuitée, 50 € par repas et 15 € par collation, et 2 000 € pour l’ensemble de la convention incluant le coût des transports pour se rendre sur le lieu de la manifestation.
- les frais d’inscriptions aux manifestations visées au premier alinéa peuvent être pris en charge en sus de ce montant, et doivent faire l’objet d’une demande d’autorisation à partir de 1 000 €.
- ces montants s’entendent toutes taxes comprises ;
- financement ou participation au financement d’actions de formation professionnelle ou de développement professionnel continu : 1 000 € ;
Avantages bénéficiant aux étudiants prévus au 2° de l’article L. 1453-4 du code de la santé publique, quelle que soit la profession à laquelle ils se destinent et la nature de la dérogation :
- rémunération nette, indemnisation et défraiement d’activités de recherche, de valorisation de la recherche, d’évaluation scientifique, de conseil, de prestation de services ou de promotion commerciale : 80 € par heure, dans la limite de 320 € par demi-journée et de 800 € pour l’ensemble de la convention ;
- dons et libéralités destinés à financer exclusivement des activités de recherche, de valorisation de la recherche ou d’évaluation scientifique : 1 000 € ;
Avantages bénéficiant aux associations mentionnées au 3° de l’article L. 1453-4 du code de la santé publique :
- rémunération nette, indemnisation et défraiement d’activités de recherche, de valorisation de la recherche, d’évaluation scientifique, de conseil, de prestation de services ou de promotion commerciale : 200 € par heure, dans la limite de 800 € par demi-journée et de 2 000 € pour l’ensemble de la convention ;
- dons et libéralités destinés à financer exclusivement des activités de recherche, de valorisation de la recherche ou d’évaluation scientifique : 8 000 € ;
- dons et libéralités destinés à une autre finalité en lien avec la santé : 1 000 € ;
- dons et libéralités bénéficiant à des associations déclarées d’utilité publique, y compris ceux destinés à financer exclusivement des activités de recherche, de valorisation de la recherche ou d’évaluation scientifique mentionnés au a : 10 000 €.
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